Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/83

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— La Pologne va être libre dans une seconde, dit un second maître d’hôtel, un Allemand qui parle anglais.

— Apportez toujours trois chaises en attendant, commande à un serviteur chinois un troisième maître d’hôtel qui a le type égyptien.

Je m’assieds, étourdi par la chaleur mais distrait par le spectacle.

Au son du jazz, des petits Chinois grêles enlacent comme de frêles lianes de solides anglo-saxonnes au tronc robuste. Un athlétique Américain tournoie, baissant la tête pour apercevoir sa danseuse, une menue poupée japonaise dont les coques de la coiffure lui arrivent au plastron. Chaque table est une petite société des nations. Des officiers en civil, des diplomates, des hommes d’affaires, des compradores, des touristes flirtent en toutes langues.

L’orchestre du jazz qui comprend huit musiciens offre huit nationalités, mais tous fraternisant pour chanter, hurlent par le nez des paroles américaines. Le second orchestre, celui des tangos et des valses, le relaie, composé de trois Philippins, d’un nègre et d’un Mexicain. Tout cela transpire dans une brume de tabac, sous une