Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/97

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Par habitude, je me demande : que dois-je visiter aujourd’hui ? La réponse m’éblouit : rien. C’est merveilleux !

Mon rickshaw m’attend. Il me coûte un dollar chinois par jour, — cinq francs. Je distingue mon coureur, tête nue sous le soleil, assis par terre entre les brancards. Il s’appelle Su et quelque chose après que j’ai oublié. Hier soir, ayant dîné dans un restaurant chinois avec un ami qui, comme moi, ne parle que des langues européennes, Su nous a servi d’interprète. Il a sorti d’un petit tiroir du rickshaw une robe qu’il a endossée sur son torse nu, un éventail qu’il a déployé et, en une seconde, s’est transformé en grand seigneur. Assis un peu en retrait dans un de ces cabinets particuliers où les serveurs crachent d’une bouche oblique en vous apportant des plats inquiétants, il a indiqué de son ongle poli les mets qu’il estimait souhaitables. Quand il fut assuré que nous n’avions plus besoin de lui, il me demanda dix cents pour aller dîner, me remercia d’un sourire courtois et, en s’éventant de sa longue main fine, sortit avec cette noblesse naturelle à quoi se reconnaît la plus antique race du monde.

À peine suis-je monté dans mon ricks-