Page:Le financier et le savetier.pdf/3

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


LE FINANCIER ET LE SAVETIER




Scène PREMIÈRE

Au lever du rideau, Belazor entre en mettant ses gants. Il est précédé de son chasseur qui s’arrête à la porte, immobile. Scène muette d’attente. — Belazor s’assoit, regarde sa montre, prend un journal, jette un coup d’œil sur le cours de la Bourse, fredonne en se promenant les mains derrière le dos, se rassoit, tapote du pied le parquet, etc.
BELAZOR.

Ils sont longs à se rendre à leur devoir, mes invités ! (On entend chanter Larfaillou). Allons, bien ! il ne me manquait plus que cela pour tromper les ennuis de l’attente !… Chante, gredin, chante !… Ce savetier mélomane ne me fera pas grâce, même le jour de ma fête ! Un jour où je réunis chez moi mes amis et quelques-uns des gros bonnets de la finance !… c’est à lui jeter du persil !… (On entend du bruit à la porte.) Mais qui pénètre si bruyamment sous mes lambris dorés ?… Ce ne peut être que le prince de Chaventru.


Scène II

BELAZOR, LARFAILLOU.
LARFAILLOU.

C’est moi, m’sieu… Larfaillou, le savetier d’en bas.

BELAZOR.

Quelle audace !

LARFAILLOU.

Vous ne me reconnaissez pas ?

BELAZOR.

Que trop, jeune homme ! que trop ! C’est vous qui chantez vingt-quatre heures par jour ! Que me voulez-vous ? Rétrogradez ! Je n’ai pas le loisir de vous donner audience. J’attends du monde. Pourquoi êtes-vous venu précisément le jour de ma fête ?

LARFAILLOU.

C’est pour ça. (Lui tapant sur le ventre.) Je me suis dit : c’est sa fête, à cet homme ; il ne me refusera pas.