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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/100

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de la faveur du roi pour leur culte. Inaugurant l’attitude des futurs chefs des Pharisiens, neutres en politique, inflexibles seulement sur l’observance de la loi, ces Assidéens accueillirent donc Alkimos comme le chef auquel les Juifs étaient habitués à obéir.

Ils furent cruellement détrompés. Alkimos fit périr soixante d’entre eux pour venger les anciennes injures. Les autres n’avaient plus de salut que dans la résistance. Judas eut bien vite fait de reconstituer le parti national et Alkimos fut réduit à retourner auprès du roi.

C’était donc de nouveau la guerre, et encore la guerre religieuse, car Nicanor, envoyé avec une armée, avait conservé les traditions de la manière fourbe et impitoyable d’Épiphane. N’ayant pas réussi à s’emparer de Judas par trahison, il menaça les prêtres de brûler le lieu saint, s’ils ne lui livraient le Macchabée et les siens. Cette brutalité ne pouvait qu’indisposer les plus conciliants. Nicanor perdit la vie dans une défaite qui demeura célèbre dans la mémoire des Juifs comme un triomphe de Dieu sur ses ennemis. Le 13 d’Adar fut « le Jour de Nicanor » [1].

Judas demeura donc pour quelque temps maître de la situation en Judée. Persuadé, nous l’avons dit, que l’indépendance religieuse ne serait garantie que par l’indépendance nationale, cet homme de guerre, véritable homme d’État, prit le parti de recourir aux Romains « pour secouer le joug qui pesait sur les Juifs » [2]. C’était peut-être aller au devant d’un autre joug. Mais les Romains étaient alors fort éloignés. Ce ne fut que longtemps après que les Juifs sentirent le poids de leurs nouvelles chaînes, longtemps très adoucies par le souvenir de l’empressement des Juifs à se mettre aux côtés de Rome dans sa lente pénétration en Asie. L’empire n’oublia jamais ce premier geste, et accorda toujours à ses anciens alliés, même après leurs séditions, un statut privilégié respectueux de leur culte et de leur législation.

Le sénat exerçait déjà sur la Syrie non point une tutelle, ce qui supposerait de la bienveillance, mais une surveillance étroite et hostile. Habitué à traiter avec des rois ou avec des compétiteurs à la couronne dont les dissensions lui frayaient le chemin, il fit bon accueil à cette étrange proposition d’un chef de parti. Mais s’il l’accepta à tout hasard, il ne se crut pas sans doute obligé à agir, ni surtout à agir vite.

Démétrius le prévint. Bacchidès reparut de nouveau en Judée, et se montra une fois de plus un chef expérimenté. Il s’appliqua sans doute à détacher de Judas les Juifs sensibles aux promesses de liberté religieuse. L’ancienne ardeur était tombée. De trois mille hommes sur lesquels comptait Judas, il ne s’en trouva que huit cents auprès de lui avant la

  1. Février 161 av. J.-C.
  2. τοῦ ἆραι τὸν ζυγὸν ἀπ’ αὐτῶν (I Macch., viii, 18).