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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/315

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cas où ce terme paraît trop dur, tient au langage du temps. Il n’était pas prescrit d’éviter toutes ces impuretés ; ce qui était édicté avant tout, c’était la purification, car il était des impuretés contractées par l’exercice d’un acte légitime, sans le moindre péché, même véniel. En somme on était obligé de se laver, de prendre un bain, dans les cas les plus graves d’offrir un petit sacrifice, ce qui n’obligeait pas à un voyage spécial à Jérusalem. Il eût été grave d’aller dans le Temple en état d’impureté[1], mais il était facile de s’en abstenir.

Les idées anciennes[2], sanctionnées par le droit divin, admettaient une certaine contagion de l’impureté, qui est encore dans la nature, et que la Loi étendait fort loin, mais qu’une époque plus civilisée n’aurait pas du étendre encore davantage[3]. Il eût fallu s’en tenir strictement aux cas déterminés, relatifs surtout aux « impuretés » des femmes.

Sur ce point, comme sur celui du sabbat, l’imagination des scribes s’était donné libre carrière. Le « saint » craignait de se contaminer par le simple contact de ceux qui ne se seraient pas purifiés, et pour plus de sûreté il soupçonnait d’être dans ce cas tous ceux qui ne faisaient pas profession de sainteté. Notez que ce saint encourait très délibérément une impureté légale par l’union entre époux ; il n’y voyait sûrement pas une raison de s’abstenir. Mais lorsqu’il s’agissait d’entrer en relations avec le prochain, l’impureté devenait un fantôme redoutable comme si l’on était responsable de la négligence qu’on lui imputait, peut-être gratuitement.

C’est là, si nous ne nous trompons, l’erreur fondamentale du pharisaïsme : faire du zèle religieux une raison d’éviter les relations cordiales avec le prochain et presque un devoir de le mépriser comme impur.

Autre scrupule à propos des dîmes. Le clergé n’avait pas eu de terres lors du partage. Par un principe admirable, Dieu était son partage. C’était aux autres à pourvoir à son entretien. D’où les dîmes à payer aux prêtres et aux lévites sur les fruits du sol[4].

Les paysans étaient-ils toujours exacts à payer ces dîmes ? Vraisemblablement non, d’autant que les Pharisiens ajoutaient à la liste des objets imposés. Le fossé se creusait, le cas de conscience devenait obsédant. Lorsque le Pharisien achetait des légumes au marché, avait-il le droit de les consommer si la dîme n’avait pas été d’abord prélevée ? Il s’en faisait un scrupule que la loi ne lui avait pas imposé ni même sug-

  1. Lev., xv, 31.
  2. Études sur les religions sémitiques, 2e éd., p. 141-157.
  3. Les modernes sont étonnés, presque choqués, que le sujet des périodes mensuelles des femmes occupe une quinzaine de versets dans la Bible. Dans le Talmud c’est tout un traité (Nidda) qui roule sur la situation tragi-comique d’un docteur marié.
  4. Num., xviii, 20-32 ; Dt., xiv, 22-29.