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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/528

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temple de Iahvé, établi par les Samaritains au mont Garizim, existait déjà en 411, — on peut le conjecturer d’après cette démarche même. Exclus de toute participation au rétablissement du Temple de Jérusalem, les Samaritains avaient dressé autel contre autel. Les Judéens d’Éléphantine s’offraient à eux comme des alliés, ils avaient droit à leur appui.

Bagoï et Delaïah se concertèrent. Le dernier mot appartenait à Archam, satrape d’Égypte pour le grand roi. Ils le priaient donc de rétablir les choses dans l’état avant l’attentat de Widarnag, et d’autoriser les Judéens à offrir des oblations et de l’encens, comme ci-devant. Était-ce vraiment un retour au statu quo ? Le mémorandum est muet sur les sacrifices sanglants. N’est-ce pas à cause de ces sacrifices, où figurait l’agneau ou le bélier, adoré par les prêtres de Chnoum, que le pogrom avait été déchaîné ? Convenait-il de les rétablir ? Les deux gouverneurs du pays d’Israël n’y auraient sans doute vu aucune difficulté rituelle. C’était à ceux d’Éléphantine d’aviser. Il semble bien que ceux-ci, ou du moins un parti plus ardent, auraient désiré davantage (1). Nous ne savons à quoi l’on s’arrêta.

Restait la célébration de la Pâque, non moins offensante pour les prêtres de Chnoum, à cause de l’immolation de l’agneau, mais si indispensable pour un Israélite, si chère en particulier à ceux qui souhaitaient dans leur cœur un nouvel exode du pays de la captivité, comme au jour où fut instituée la Pâque qui mit un terme à la persécution du Pharaon. Un document un peu antérieur, de l’an 5 de Darius II, suggère qu’on la célébrait selon les prescriptions légales de l’Exode et du Deutéronome, puisque quelques traits sont les mêmes (2), mais des lacunes cachent peutêtre l’essentiel. Les Judéens d’Éléphantine étaient-ils donc vraiment repentants, inviolablement attachés comme ceux de Jérusalem à la loi si souvent violée par leurs pères ? Leur zèle pour la maison de Dieu semble le prouver, et les documents de la hiérarchie sont confirmés par la générosité des particuliers nommés comme donataires pour les contributions sacrées versées à Iaô. Mais cette liste même a donné naissance à des suspicions inquiétantes. Au nom divin traditionnel sont joints d’autres noms on souscrit pour Ismbéthel (Nom de Béthel) et pour Anathbéthel (Anath de Béthel). Anath est même associé à laô. Le nom de Baal ne s’est rencontré que sur des ostraca phéniciens. Mais la déesse Anath aurait dû inspirer la même horreur c’est précisément un des vocables de cette Reine du ciel qu’abominait Jérémie. Faut-il admettre une sorte de cartel entre des

(1)

(2)

Papyrus 5.

Cf. Ex., XII, 6. 18 ; Dt., xvi, 4-8.