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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/90

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de Marissa[1]. Quand les Juifs s’éloignaient des environs de Jérusalem, ils se trouvaient au milieu de colonies aux noms hellénisés ou même franchement helléniques, Scythopolis, l’ancienne Beth-chean ; Ptolémaïs, l’ancienne Acca ; Philadephie, l’ancienne Ammon ; Pella, qui rappelait la capitale de la Macédoine, Hippos et tant d’autres.

Le judaïsme cantonné en Judée était donc menacé comme par une marée montante assiégeant les falaises dominées parle Temple du Seigneur rebâti. Assurément la langue grecque avait pénétré dans la capitale. Le nom d’Eupolemos, fils de Jean, marque un progrès dans ce sens. Cet Eupolemos, bien vu à la cour de Syrie, avait obtenu des franchises pour les Juifs[2].

Pourtant le judaïsme demeurait maître chez lui, et rien n’indique qu’il eût dû céder à la longue s’il n’avait été réveillé par la persécution[3]. S’il s’est maintenu en Égypte, combien la résistance était plus aisée à Jérusalem, au centre de la race, dans l’isolement des montagnes, où les Grecs n’avaient aucun intérêt à se glisser, car le commerce y était presque nul, l’agriculture ne fournissant pas d’argent disponible. De sorte que l’ascendant littéraire était lui aussi moins sensibLe. Même après la fondation d’Aelia, Jérusalem fut un foyer beaucoup moins actif d’études grecques que telle ville obscure comme Gadara.

Il y avait cependant près du Temple, et dans le sacerdoce même, un parti déterminé à introduire les usages des Grecs, regardés comme plus policés et plus élégants. Mais ce parti n’entra en scène que sous Antiochus Épiphane, et il ne menaçait pas en somme l’intégrité de la religion. Sans l’intervention du roi, la crise religieuse ne se serait pas produite. Quelle que soit la force secrète de l’évolution générale des sociétés, l’histoire n’aurait pas pris certains cours sans l’impulsion donnée par des personnalités puissantes.

Antiochus IV Épiphanès[4], fils d’Antiochus le Grand, avait été élevé à Rome où son père l’avait envoyé comme otage. Il y garda son instinct

  1. Painted tombs in the Necropolis of Marissa (Mareshah), by John P. Peters… and Hermann Thiersch… 1905. — Dans Dittenberger, Orientis graeci, Ins. n° 593 on lit « Exscripserunt Bliss et Macalister, quorum exemplum editum est Comptes rendus de l’Acad. des Inscr. 1902, p. 500. » — Les deux savants cités sont demeurés complètement étrangers à cette découverte. Nous reviendrons sur ce curieux monument ; cf. p. 104, n. 1.
  2. II Macch., iv, 11.
  3. Comme le conjecture Schürer, Geschichte…, I, p. 189 s.
  4. « Ce prince parut alors avec tous les caractères que Daniel avait marqués : ambitieux, avare, artificieux, cruel, insolent, impie, insensé, enflé de ses victoires, et puis, irrité de ses pertes » (Bossuet, Discours, II, xiv). Bossuet a donc parfaitement compris que Daniel faisait allusion à Antiochus Épiphane : « Daniel… vit par ordre, à diverses fois, et sous des figures différentes, quatre monarchies sous lesquelles devaient vivre les Israélites. Il les marque par leurs caractères propres. On voit passer comme un torrent l’empire d’un roi des Grecs : c’était celui d’Alexandre. Par sa chute on voit établir un autre empire moindre que le sien, et affaibli par ses divisions : c’est celui de ses successeurs », qui est donc le quatrième. On voit enfin :