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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/91

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despotique de souverain oriental, tout en adoptant les façons de la démocratie qui grandissait à Rome. Fantasque dans ses goûts, épris de popularité, il sortait presque seul avec un ou deux compagnons, se mêlait aux jeunes gens menant la débauche, courait les bains publics, mais s’y faisait remarquer par une profusion d’huiles parfumées. Il adressait la parole aux étrangers, quêtant même les voix des électeurs. Puis il fréquentait chez les orfèvres, affectant un goût éclairé pour les choses de l’art. A Rome la religion était prise au sérieux plus qu’en Grèce. En Syrie elle avait conservé son caractère d’obligation absolue et fatale. Polybe, assez embarrassé de fixer les traits d’un personnage aussi versatile, accuse du moins ce trait de son caractère « Mais pour les sacrifices offerts dans les cités et les honneurs rendus aux dieux, il surpassa tous ceux qui avaient régné avant lui »[1]. Si Julien l’Apostat se distingua de lui par une affectation de vie simple et frugale, tous deux eurent en commun un zèle fanatique pour l’hellénisme, seule culture digne de l’humanité, et cette conviction que l’hellénisme ne saurait prévaloir entièrement que par sa religion. Le bien des Juifs exigeait donc qu’ils prissent les mœurs des Grecs ; c’était leur intérêt bien compris, et pour cela il fallait que cette nation arriérée renonçât à sa supersititon. C’est ce que Tacite a rendu avec sa vigueur ordinaire[2] : « Le roi Antiochus, résolu à extirper la superstition et à implanter les mœurs grecques, fut empêché par la guerre des Parthes d’améliorer une race infecte ».

L’historien romain attribue l’échec d’Antiochus à la guerre dans laquelle il périt, conclusion assez naturelle. Cependant nous constatons avec Schürer que : « c’est le seul exemple d’une religion orientale qui s’émancipa complètement de l’influence de l’hellénisme »[3]. Nous avons le droit d’en conclure que cette religion possédait un principe supérieur qui lui a permis de résister à cette redoutable épreuve de la force, mise au service de la séduction, de laquelle seuls le judaïsme d’abord, puis le christianisme ont triomphé, et de voir dans cet heureux succès une preuve de l’assistance de Dieu, en faveur de la religion qu’il a révélée.

Il est d’ailleurs assez clair qu’Épiphane s’est engagé de plus en plus dans la voie de la violence parce que la contagion des mœurs grecques


    « l’orgueil et les autres marques qui désignent Antiochus l'Illustre, implacable ennemi du peuple de Dieu ; la brièveté de son règne et la prompte punition de ses excès. On voit naître enfin sur la fin, et comme dans le sein de ces monarchies, le règne du Fils de l’homme » (Discours, II, ix). On voit tout cela dans les chapitres ii, vii, viii, xi. Bossuet donne une autre explication du ch. ix, mais Daniel y traite manifestement le même sujet (Voir RB., 1930, p. 179-198). Le même Bossuet dit de Zacharie : « Les persécutions des rois de Syrie, et les guerres qu’ils font à Juda, lui sont découvertes dans toute leur suite (Disc., III, x).

  1. Polybe, xxvi, 10.
  2. Hist., v, 8.
  3. Geschichte, I, p. 190.