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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 11, trad Mardrus, 1902.djvu/133

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les séances… (le tombeau des amants)
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on ne peut échapper à la destinée, même si on la fuit avec des ailes. Et c’est mon ami Otbah qui devait boire jusqu’à lie, en une gorgée, la coupe inévitable ! En effet, nous fûmes soudain tirés de notre repos par une attaque terrible de cavaliers armés qui fondirent sur nous, en poussant des cris et des hurlements. Or, c’étaient des cavaliers de la tribu des Bani-Soulaim, envoyés par le cheikh Al-Ghitrif pour enlever sa fille. Car il n’avait point osé violer, sous ses tentes, les lois de l’hospitalité, et avait attendu notre éloignement pour nous faire attaquer de la sorte, sans manquer aux coutumes du désert. Mais il comptait sans la valeur d’Otbah et de nos cavaliers qui, avec un grand courage, soutinrent l’attaque des Bani-Soulaim, et finirent, après en avoir tué un grand nombre, par les mettre en déroute. Mais, au milieu de la mêlée, mon ami Otbah reçut un coup de lance, et, quand il fut de retour au camp, il tomba mort dans mes bras.

À cette vue, la jeune Riya poussa un grand cri et vint s’abattre sur le corps de son amant. Et elle passa toute la nuit à se lamenter. Et quand vint le matin, nous la trouvâmes morte de désespoir. Qu’Allah les ait tous deux en Sa Miséricorde ! Et nous leur creusâmes dans le sable un tombeau, et nous les enterrâmes l’un à côté de l’autre. Et, l’âme en deuil, nous regagnâmes Médine. Et moi, ayant terminé ce que j’avais à terminer, je rentrai dans mon pays.

Mais, sept ans plus tard, le désir m’envahit de refaire un pèlerinage aux lieux saints. Et mon âme souhaita aller visiter le tombeau d’Otbah et de Riya.