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les mille nuits et une nuit

dernier jour fut une fête spécialement réservée pour les pauvres, qu’on prit soin de convier à prendre place autour des plateaux servis pour eux, en toute générosité.

Or, Kamar, qui surveillait lui-même les serviteurs pendant ce festin, remarqua parmi les pauvres un homme plus mal vêtu que les plus pauvres et brûlé par le soleil, avec, sur sa figure, les traces de longues fatigues et de cuisants chagrins. Et, arrêtant sur lui ses regards pour l’appeler, il reconnut le joaillier Osta-Obeid. Et il courut faire part de sa découverte à son père qui lui dit : « C’est le moment de réparer, autant qu’il est en notre pouvoir, le mal que tu as commis à l’instigation de la dévergondée que j’ai enfermée ! » Et il s’avança du côté du vieux joaillier qui était sur le point de s’éloigner, et, l’appelant par son nom, il l’embrassa tendrement et l’interrogea sur le motif qui l’avait réduit à un tel état de pauvreté. Et Osta-Obeid lui raconta qu’il était parti de Bassra, afin que son aventure ne fût pas ébruitée et ne pût fournir à ses ennemis l’occasion de se moquer de lui, mais qu’il était tombé, dans le désert, entre les mains des Arabes pilleurs qui l’avaient dépouillé de tout ce qu’il possédait ! » Et le vénérable Abd el-Rahmân se hâta de le faire conduire au hammam et, après le bain, de le faire vêtir de riches habits ; puis il lui dit : « Tu es mon hôte, et je te dois la vérité ! Sache donc que ton épouse Halima est ici, enfermée par mes ordres dans un pavillon retiré. Et je pensais te la renvoyer sous escorte à Bassra ; mais puisqu’Allah t’a conduit jusqu’ici, c’est que le sort de cette