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le diwân des facéties… (bahloul…)
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qui sera bien courte, tu sauras par Allah ! quel est le nombre de fous de la capitale de ton empire ! »

Et c’est ce même Bahloul qui s’étant assis, un jour, sur le trône du khalifat, reçut, pour cette témérité, de la part des huissiers, une volée de coups de bâton. Et les cris épouvantables qu’il poussa dans cette circonstance, mirent en émoi tout le palais et attirèrent le khalifat lui-même. Et Haroun, voyant que son bouffon pleurait à chaudes larmes, entreprit de le consoler. Mais Bahloul lui dit : « Hélas, ô émir des Croyants, ma douleur est sans consolation, car ce n’est pas sur moi que je pleure, mais sur mon maître le khalifat ! Si, en effet, j’ai reçu tant de coups pour avoir occupé un instant son trône, quelle grêle le menace là-bas, lui qui l’aura occupé des années et des années ! »

Et c’est toujours le même Bahloul qui fut assez sage pour avoir le mariage en horreur. Et Haroun, pour lui jouer un mauvais tour, lui fit épouser de force une adolescente d’entre ses esclaves, en l’assurant qu’elle le rendrait heureux, et qu’il s’en portait lui-même garant. Et Bahloul fut bien obligé d’obéir, et entra dans la chambre nuptiale où l’attendait sa jeune épouse, qui était d’une beauté de choix. Mais à peine s’était-il étendu à ses côtés, qu’il se leva soudain avec terreur et s’enfuit, hors de la chambre, comme s’il était poursuivi par des ennemis invisibles, et se mit à courir comme un fou à travers le palais. Et le khalifat, informé de ce qui venait de se passer, fit venir Bahloul en sa présence, et lui demanda, d’une voix sévère : « Pourquoi, ô maudit, as-tu fait cette offense à ton épouse ? » Et