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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/240

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les mille nuits et une nuit

mauvais caractère ! On raconte qu’un arbre était planté sur le bord des eaux, dans un terrain propice ; et il ne portait pas de fruits. Et son maître, après qu’il lui eût prodigué tous les soins sans obtenir le moindre résultat, voulut le couper, et l’arbre lui dit : « Transporte-moi dans un autre endroit, et je porterai des fruits ! » Et son maître lui dit : « Tu es ici sur le bord des eaux, et tu n’as rien produit. Comment deviendrais-tu fécond, si je te transportais ailleurs ? » Et il le coupa ! » Et l’adolescent s’arrêta un moment, et dit : « On raconte également qu’un jour on fit entrer un loup dans une école pour lui apprendre à lire. Et le maître, pour lui apprendre les éléments de la langue, lui disait : « Aleph, Ba, Ta… », mais le loup répondait : « Mouton, chevreau, brebis… », parce que tout cela était dans sa pensée et dans sa nature. — Et on raconte également qu’on voulut habituer un âne à la propreté et lui inspirer des goûts délicats. Et on le fit entrer au hammam, et on lui donna un bain, et on le parfuma, et on l’installa dans une salle magnifique, et on le fit asseoir sur un riche tapis. Et voici qu’il fit tout ce qu’un âne, en liberté dans un herbage, peut faire d’incongru, depuis les bruits les plus inconvenants jusqu’aux exhibitions les plus indélicates. Après quoi, il renversa avec sa tête, sur le tapis, le poêle en cuivre qui était rempli de cendre, et se mit à se vautrer dans la cendre, les quatre jambes en l’air et les oreilles en arrière, en se frottant le dos et en se salissant à plaisir. Et son maître dit aux esclaves qui accouraient pour le corriger : « Laissez-le se vautrer, puis emmenez-le et laissez-le en liberté dans son écu-