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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/274

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les mille nuits et une nuit

Or, en route, le vieux s’aperçut qu’il n’avait pas pris avec lui ses babouches, qu’il avait l’habitude de tenir à la main en chemin, ou de suspendre sur ses épaules. Et il dit à son fils : « Retourne vite à la maison me les chercher. » Et le gaillard retourna tout d’une haleine à la maison, et, ayant aperçu les deux adolescentes, épouses de son père, assises sur la terrasse, il leur cria d’en bas : « Mon père m’envoie vers vous autres, chargé d’une commission ! » Elles demandèrent : « Et laquelle ? » Il dit : « Il m’a ordonné de revenir ici, et de monter vous embrasser autant que je veux, toutes les deux, toutes les deux ! » Et elles répondirent : « Que dis-tu là, ô chien ? Par Allah ! ton père n’a jamais pu te charger d’une telle mission ; et tu mens, ô garnement de la pire espèce, ô cochon ! » Il dit : « Ouallahi, je ne mens pas ! » Et il ajouta : « Et je vais vous prouver que je ne mens pas ! » Et, de toute sa voix, il cria à son père, qui était loin : « Ô mon père, ô mon père ! une seulement, ou bien les deux ? une seulement, ou bien les deux ? » Et le vieux répondit, de toute sa voix : « Les deux, ô débauché, les deux à la fois ! Et qu’Allah te maudisse ! » Or, ô mon seigneur le sultan, le vieux voulait signifier par là à son fils qu’il eût à lui apporter les deux babouches, et non à embrasser ses deux épouses.

En entendant cette réponse de leur époux, les deux adolescentes se dirent l’une à l’autre : « Le gaillard n’a pas menti ! Laissons-le donc faire avec nous ce que son père lui a commandé de faire. »

Et c’est ainsi, ô mon seigneur le sultan, que, grâce à cette ruse des babouches, le gaillard put