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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/303

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histoire d’ali baba…
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n’avait voulu condescendre à franchir le seuil de sa maison. La fille de putain ! Elle entra avec un visage retourné, et dit à Ali Baba : « Le salam sur toi, ô frère de choix de mon époux ! Les frères se doivent aux frères, et les amis aux amis. Or, moi je viens te prier de me tranquilliser sur le sort de ton frère qui est allé, comme tu le sais, à la forêt, et qui, malgré la nuit avancée, n’est pas encore de retour. Par Allah sur toi ! ô visage de bénédiction, hâte-toi d’aller voir ce qui lui est arrivé dans cette forêt ! »

Et Ali Baba, qui était notoirement doué d’une âme compatissante, partagea l’alarme de l’épouse de Kassim, et lui dit : « Qu’Allah éloigne les malheurs de la tête de ton époux, ma sœur ! Ah ! si Kassim avait bien voulu écouter mon conseil fraternel, il m’eût pris avec lui comme guide ! Mais ne t’inquiète pas outre mesure de son retard ; car, sans doute, il aura jugé à propos, pour ne pas attirer l’attention des passants, de ne rentrer en ville que bien avant dans la nuit ! »

Or, cela était vraisemblable, bien, qu’en réalité, Kassim ne fût plus Kassim mais six quartiers de Kassim, deux bras, deux jambes, un tronc et une tête, qui avaient été disposés par les voleurs à l’intérieur même de la galerie, derrière la porte rocheuse, afin qu’ils épouvantassent par leur vue et repoussassent par leur puanteur quiconque aurait eu la hardiesse de franchir le seuil défendu.

Donc Ali Baba tranquillisa tant qu’il put la femme de son frère, et lui fit remarquer que les recherches n’aboutiraient à rien pendant la nuit noire. Et il l’invita à passer la nuit en leur compagnie, en toute