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les mille nuits et une nuit

cordialité. Et l’épouse de Kassim la fit coucher dans son propre lit, tandis qu’Ali Baba l’assurait que dès l’aurore il s’en irait à la forêt.

Et, en effet, dès les premières lueurs de l’aube, l’excellent Ali Baba était déjà dans la cour de sa maison, près de ses trois ânes. Et il partit sans retard avec eux, après avoir recommandé à l’épouse de Kassim de modérer son affliction, et à sa propre épouse de la soigner et de ne la laisser manquer de rien.

Or, en approchant du rocher, Ali Baba fut bien obligé de s’avouer, en ne voyant pas les mulets de Kassim, que quelque chose de grave avait dû se passer, d’autant plus qu’il n’avait rien rencontré dans la forêt. Et son inquiétude ne put qu’augmenter en voyant le sol, au pied du rocher, taché de sang. Aussi ce ne fut point sans un grand émoi qu’il prononça les trois mots magiques de l’ouverture, et qu’il entra dans la caverne.

Et le spectacle des six quartiers de Kassim épouvanta ses regards et fit trembler ses genoux. Et il faillit tomber évanoui sur le sol. Mais les sentiments qu’il avait pour son frère lui firent surmonter son émotion, et il n’hésita pas à faire tout le possible pour essayer de rendre les derniers devoirs à son frère, qui était musulman après tout, et fils du même père et de la même mère. Et il se hâta de prendre, dans la caverne, deux grands sacs dans lesquels il mit les six quartiers de son frère, le tronc dans l’un, et la tête avec les quatre membres dans l’autre. Et il en fit la charge de l’un de ses ânes, en les recouvrant soigneusement de bois coupé et de bran-