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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 15, trad Mardrus, 1904.djvu/169

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histoire de la jouvencelle…
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suis la bien-aimée des anachorètes et des contemplatifs. Et j’ai consolé Agar et guéri Ismaël.

Libre, je suis libre et semblable aux filles de sang noble qu’on n’expose point en vente dans les marchés des villes.

Les libertins ne me recherchent point ; mais celui-là seul m’estime qui, formant un dessein inébranlable, se découvre la jambe et s’élance sur le coursier rapide, un brin de ma tige à sa tempe.

Je voudrais que tu fusses dans le désert de Najd, dont je suis originaire, lorsque la brise du matin erre auprès de moi dans les vallées.

Mon odeur fraîche et aromatique parfume le Bédouin solitaire, et mon exhalaison honnête réjouit l’odorat de ceux qui se reposent auprès de moi.

Aussi, lorsque le rude chamelier vient à décrire mes rares qualités aux gens de la caravane, ne peut-il s’empêcher de parler de moi avec attendrissement.

« Et maintenant, si vous le voulez bien, ô mes maîtres et mes maîtresses, je vous dirai, pour finir, le Chant de l’Anémone. Le voici :

« Si mon intérieur était conforme à mon extérieur, je ne serais pas obligée de me plaindre et d’envier le sort de mes sœurs.

On vante sans cesse les riches nuances de mon vêtement, et le plus grand éloge à faire de la joue des vierges est de la trouver semblable à mon incarnat.

Et cependant, celui qui m’aperçoit me dédaigne ; on ne me place pas dans les vases qui décorent les salles des festins ; personne ne fait l’éloge de mes agré-