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les mille nuits et une nuit

— sur Lui la prière, la paix et les plus choisies des bénédictions. Amîn !

Or, le sultan Baïbars aimait son peuple et en était aimé ; et tout ce qui, de près ou de loin, touchait au peuple, soit en tant que coutumes et mœurs, soit en tant que traditions et usages locaux, l’intéressait à l’extrême. Aussi, non seulement aimait-il à voir toutes choses avec son œil, et à écouter avec son oreille, mais se délectait-il aux histoires, et à entendre les conteurs ; et avait-il élevé aux plus hauts grades ceux de ses officiers, de ses gardes et de ses familiers qui savaient le mieux conter les choses du passé et rapporter les choses du présent.

Aussi, une nuit qu’il était plus disposé que de coutume à écouter et à s’instruire, il réunit tous les capitaines de police du Caire, et leur dit : « Je veux que vous me contiez ce soir ce que vous connaissez de plus digne d’être conté. » Et ils répondirent : « Sur nos têtes et nos yeux ! Mais, notre maître veut-il que nous racontions ce qui nous est arrivé personnellement, ou ce que nous savons sur autrui ? » Et Baïbars dit : « C’est là une demande délicate. C’est pourquoi, que chacun de vous soit libre de raconter ce qu’il désire, mais à la condition que ce soit tout à fait surprenant ! » Et ils répondirent : « Hé, ouallah, ô notre maître ! notre esprit t’appartient, ainsi que notre langue et notre fidélité ! »

Et le premier qui s’avança entre les mains de Baïbars, pour commencer, était un capitaine de police qui s’appelait Môïn Al-Dîn, dont le foie était ulcéré d’amour pour les femmes et le cœur empiégé sans cesse dans leurs traînes. Et, après les souhaits de