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les lucarnes… (le poète doreïd…)
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Doreïd, qui avait pris bien soin de cacher son nom et sa qualité, fut mis, avec tous les autres captifs, sous une garde sévère. Mais les femmes firâcides, frappées de sa bonne mine, venaient d’un air coquet passer et repasser en triomphatrices devant lui. Et tout à coup une d’elles s’écria : « Par la mort noire ! quel beau coup vous avez fait là, enfants de Firâs ! Savez-vous qui est celui-ci ? » Et on accourut, et on regarda, et on répondit : « Celui-ci est un de ceux qui ont éclairci nos rangs ! » Et la femme dit : « Certes ! c’est un brave ! C’est précisément celui qui fit cadeau de sa lance à Rabiah le jour de la vallée. » Et elle jeta sa tunique, en signe de sauvegarde, sur le prisonnier, en ajoutant : « Enfants de Firâs, je prends, moi, ce captif-là sous ma protection. » Et on se pressa encore davantage, et on demanda son nom au captif, qui répondit : « Je suis Doreïd ben Simmah. Mais toi, ô dame, qui es-tu ? » Elle répondit : « Je suis Raïta, fille de Gizl El-Tiân, celle dont Rabiah conduisait le chameau. Et Rabiah était mon mari. »

Puis elle alla se présenter à toutes les tentes de la tribu, et tint aux guerriers ce langage : « Enfants de Firâs, rappelez-vous la générosité du fils de Simmah, lorsqu’il donna à Rabiah sa lance à la hampe longue et belle. Or, le bien pour le bien, et à chacun le fruit de ses œuvres. Que la bouche des hommes ne se gonfle pas de mépris, en racontant votre conduite à l’égard de Doreïd. Brisez ses liens et, en payant l’indemnité, retirez-le des mains de celui qui l’a fait captif. Sinon, vous poseriez devant vous une œuvre de honte qui serait, jusqu’à votre mort, un mar-