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les mille nuits et une nuit

avait commise de ne s’être pas approprié la lance de son dernier agresseur. Toutefois il attendit Doreïd, droit sur sa selle, et le bois de sa lance brisée au poing.

Et Doreïd, d’un coup d’œil, vit l’état d’infériorité de Rabiah, et sa grande âme l’incita à adresser ces paroles au héros Firâcide : « Ô père des cavaliers des Bani-Firâs, certes ! des hommes comme toi, on ne les tue pas. Toutefois, mes gens, qui battent le pays, voudront venger sur toi la mort de leurs frères, et, comme tu es désarmé, seul et si jeune ! tiens, prends ma lance. Quant à moi, je m’en retourne pour ôter à mes compagnons l’envie de te poursuivre. »

Et Doreïd repartit à grande course vers ses gens, et leur dit : « Le cavalier a su défendre sa dame. Car il a tué nos trois hommes et, de plus, il m’a accroché ma lance. En vérité c’est un rude champion qu’il ne faut pas songer à attaquer ! »

Et ils tournèrent bride et rentrèrent tous, sans razzia, dans leur tribu.

Et les années passèrent. Et Rabiah mourut comme meurent les cavaliers sans reproche, dans une rencontre sanglante avec ceux de la tribu de Doreïd. Et, pour le venger, une troupe de Firâcides partit en nouvelle razzia contre les Bani-Joucham. Et ils tombèrent inopinément de nuit sur le campement, et tuèrent ceux qu’ils tuèrent, et firent nombre de captifs, et enlevèrent un butin considérable en femmes et en biens. Et, dans le nombre des captifs, était Doreïd lui-même, le cheikh des Jouchamides.

Et, lorsqu’on arriva à la tribu des vainqueurs,