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la fin de giafar et des barmakides
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céder de quelque serviteur pour m’annoncer ta visite. » Et Massrour, sans même jeter le salam à Giafar, répondit : « Le sujet qui m’amène est trop grave pour me permettre ces futiles formalités. Lève-toi, ô Giafar, et prononce la scheada pour la dernière fois. Car l’émir des Croyants demande ta tête. »

En entendant ces paroles, Giafar se leva sur ses pieds, et dit : « Il n’y a d’autre Dieu qu’Allah, et Môhammad est l’Envoyé d’Allah ! Nous sortons des mains d’Allah, et tôt ou tard nous retournons entre Ses mains ! » Puis il se tourna vers le chef des eunuques, son ancien compagnon, son ami de tant d’années et de tous les instants, et lui dit : « Ô Massrour, un tel ordre n’est pas possible. Notre maître l’émir des Croyants a dû te le donner dans un moment d’ivresse. Je te supplie, ô mon ami de toujours, en souvenir de nos promenades ensemble et de notre commune vie de jour et de nuit, de retourner auprès du khalifat, pour voir si je ne me trompe pas. Et tu constateras qu’il aura déjà oublié de telles paroles ! » Mais Massrour dit : « Ma tête répond de la tienne. Je ne puis reparaître en présence du khalifat que ta tête à la main. Écris donc tes dernières volontés, c’est la seule grâce qu’il me soit possible, à cause de l’ancienne amitié, de t’accorder. » Alors Giafar dit : « Nous appartenons tous à Allah ! Je n’ai point de dernières volontés à écrire. Qu’Allah allonge la vie de l’émir des Croyants des jours qui me sont enlevés ! »

Puis il sortit de sa tente, s’agenouilla sur le cuir du sang, que venait d’étendre sur le sol le porte--