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les mille nuits et une nuit

res victorieuses ? » Elle répondit : « Ô Giafar, je suis ta captive, ta servante, je suis Abbassah, sœur d’Al-Rachid, fille d’Al-Mahdi, du sang d’Abbas, oncle du Prophète béni ! »

En entendant ces paroles, Giafar fut à la limite de la stupéfaction, et, revenu soudain de l’éblouissement de l’ivresse, il s’écria : « Tu t’es perdue et tu nous as perdus, ô fille de mes maîtres ! »

Et, en hâte, il entra chez sa mère Itâbah, et lui dit : « Ô ma mère, ma mère, tu m’as vendu bon marché ! » Et l’attristée épouse de Yahia raconta à son fils comment elle avait été forcée de recourir à cette ruse, pour ne pas attirer sur leur maison de plus grands malheurs. Et voilà pour ce qui la regardait.

Quant à Abbassah, elle devint mère, et donna le jour à un fils. Et elle confia l’enfant à la surveillance d’un serviteur dévoué appelé Ryasch, et aux soins maternels d’une femme appelée Barrah. Puis, craignant sans doute que la chose s’ébruitât, malgré toutes les précautions, et parvînt à la connaissance d’Al-Rachid, elle envoya à la Mecque le fils de Giafar en compagnie de deux serviteurs.

Or Yahia, père de Giafar, avait, dans ses prérogatives, la garde et l’intendance du palais et du harem d’Al-Rachid. Et il avait pour habitude, après une certaine heure de la nuit, de fermer les portes de communication du palais et d’en emporter les clés. Or, cette sévérité finit par devenir une gêne pour le harem du khalifat, et surtout pour Sett Zobéida qui alla s’en plaindre amèrement à son cousin et époux Al-Rachid, en maudissant le vénérable Yahia et ses rigueurs déplacées. Et Al-Rachid, quand Yahia se