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les mille nuits et une nuit

était, trait pour trait, l’image charmante du prince Jasmin. Et, à mesure que se manifestait devant les yeux de son âme de vierge, cette vision de beauté, le cœur jusque là sans souci de la jeune fille glissait de sa main et devenait le prisonnier du filet des boucles entortillées de l’adolescent. Et elle se réveilla le cœur agité par la rose de son sommeil, et, jetant dans la nuit des cris comme le rossignol, elle se mit à laver son visage avec ses larmes. Et ses servantes accoururent en grand émoi et s’exclamèrent, en la voyant : « Ya Allah ! quel est ce malheur qui fait tomber les larmes de notre maîtresse Amande ? Que s’est-il passé dans son cœur, pendant le sommeil ? Hélas ! voici que semble s’envoler l’oiseau de son intelligence. »

Et des gémissements et des soupirs eurent lieu jusqu’au matin. Et, à l’aurore, le roi, son père, et la reine, sa mère, furent instruits de ce qui se passait. Et, brûlés dans leur cœur, ils vinrent regarder, et virent que leur fille, cette charmante, avait une apparence extraordinaire et un état singulier. Elle était assise, les cheveux et les vêtements en désordre, le visage décomposé, sans nouvelles de son corps et sans attention pour son cœur. Et, à toutes les questions qu’ils lui posaient, elle ne répondait que par le silence, branlant la tête avec pudeur, et répandant ainsi sur l’âme de son père et de sa mère le trouble et la désolation.

Alors on se décida à faire venir les médecins et les savants exorcistes, qui mirent tout en œuvre pour la tirer de son état. Mais ils n’obtinrent aucun résultat ; bien plus, ce fut le contraire qui arriva. Ce