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les mille nuits et une nuit

ves et émouvantes et savoureuses en leur fraîcheur ! Ô ! qu’elles sont belles, tes paroles, ma sœur ! »

Et Schahrazade se pencha vers sa sœur, et, en l’embrassant, elle lui glissa à l’oreille quelques paroles qu’elle fut seule à entendre. Et la jeune fille disparut aussitôt, comme le camphre.

Et Schahrazade resta seule, pendant quelques instants, avec le roi Schahriar. Et, comme il se disposait, à la limite du contentement, à prendre dans ses bras sa merveilleuse épouse, voici que les rideaux s’ouvrirent et Doniazade reparut, suivie par une nourrice qui tenait deux jumeaux suspendus à ses seins, alors qu’un troisième enfant marchait à quatre pattes derrière elle.

Et Schahrazade se tourna en souriant vers le roi Schahriar, et rangea devant lui les trois petits, après les avoir serrés contre sa poitrine, et, les yeux mouillés de larmes, elle lui dit : « Ô Roi du temps, voici les trois enfants que, durant ces trois années, t’a octroyés le Rétributeur par mon entremise. »

Et, pendant que le roi Schahriar, pénétré d’une joie indicible, et remué jusqu’au fond de ses entrailles, embrassait ses enfants, Schahrazade continua : « Ton fils aîné a maintenant deux ans passés, et ces deux jumeaux-ci ne vont pas tarder à avoir un an d’âge — qu’Allah éloigne d’eux trois le mauvais œil ! » Et elle ajouta : « Tu te souviens, en effet, ô Roi du temps, que j’ai été indisposée pendant une vingtaine de jours, entre la six cent soixante-dix-neuvième nuit et la sept centième. Or, c’est précisément à ce moment là que j’ai donné naissance à ces deux jumeaux, dont la venue m’a fatiguée beaucoup plus que celle de leur aîné, l’année précédente. Car j’ai été si peu dérangée par mes premières couches que j’ai pu, sans interruption, te continuer l’histoire, alors en cours, de Docte Sympathie. »

Et, ayant ainsi parlé, elle se tut.