Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 16, trad Mardrus, 1904.djvu/281

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
conclusion
277

Et le roi Schahriar, qui était à l’extrême limite de l’émotion, promenait ses regards de la mère aux enfants, et des enfants à la mère, et ne pouvait parvenir à prononcer un seul mot.

Alors la jeune Doniazade, après avoir embrassé les enfants pour la vingtième fois, se tourna vers le roi Schahriar et lui dit : « Et maintenant, ô Roi du temps, vas-tu faire couper la tête à ma sœur Schahrazade, la mère de tes enfants, et laisser ainsi orphelins de leur mère ces trois petits rois que nulle femme ne saurait aimer et soigner avec le cœur d’une mère ? »

Et le roi Schahriar dit, entre deux sanglots, à Doniazade : « Tais-toi, ô jeune fille, et reste tranquille. » Puis, étant parvenu à dominer quelque peu son émotion, il se tourna vers Schahrazade et lui dit : Ô Schahrazade, par le Seigneur de la pitié et de la miséricorde ! tu étais déjà dans mon cœur avant la venue de nos enfants. Car tu as su me gagner par les qualités dont t’a ornée ton Créateur ; et je t’ai aimée en mon esprit parce que j’ai trouvé en toi une femme pure, pieuse, chaste, douce, indemne de toute duperie, intacte à tous égards, ingénue, subtile, éloquente, discrète, souriante et sage. Ah ! qu’Allah te bénisse, et bénisse ton père et ta mère et ta race et ton origine ! »

Et il ajouta : « Ô Schahrazade, cette nuit, qui est la mille et unième, à compter du moment où je t’ai vue pour la première fois, est pour nous une nuit plus blanche que le visage du jour. » Et, ce disant, il se leva et l’embrassa sur la tête.

Et Schahrazade prit alors la main du Roi, son époux, et la porta à ses lèvres, à son cœur et à son front, et dit : « Ô Roi du temps, je te supplie d’appeler ton vieux vizir, afin que son cœur se tranquillise à mon sujet et se réjouisse en cette nuit bénie. »

Et le roi Schahriar fit aussitôt mander son vizir qui, persuadé que c’était la nuit funèbre écrite dans la destinée