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les mille nuits et une nuit

de sa fille, arriva avec, sous son bras, le linceul destiné à Schahrazade. Et le roi Schahriar se leva en son honneur, et l’embrassa entre les deux yeux et lui dit : « Ô père de Schahrazade, ô vizir à la postérité bénie, voici qu’Allah a suscité ta fille pour le salut de mon peuple ; et, par son entremise, il a fait entrer le repentir dans mon cœur. » Et le père de Schahrazade fut tellement bouleversé de joie, en voyant et entendant cela, qu’il tomba évanoui. Et on s’empressa autour de lui, et on l’aspergea d’eau de roses, et on lui fit reprendre connaissance. Et Schahrazade et Doniazade vinrent lui baiser la main. Et il les bénit. Et ils passèrent ensemble cette nuit-là dans les transports de la joie et les expansions du bonheur.

Et le roi Schahriar s’empressa d’envoyer des courriers rapides mander son frère Schahzaman, roi de Samarkand Al-Ajam. Et le roi Schahzaman répondit par l’ouïe et l’obéissance, et s’empressa de se rendre auprès de son frère aîné, qui était sorti à sa rencontre, à la tête d’un magnifique cortège, au milieu de la ville entièrement ornée et pavoisée, alors que dans les souks et dans les rues on brûlait l’encens, le camphre sublimé, l’aloès, le musc indien, le nadd et l’ambre gris, que les habitants se teignaient fraîchement les mains au henné et le visage au safran, et que les tambours, les flûtes, les clarinettes, les fifres, les cymbales et les tympanons faisaient résonner l’air comme aux jours de grandes fêtes.

Et, après les épanchements de la rencontre, et tandis que les réjouissances et les festins se donnaient entièrement aux frais du trésor, le roi Schahriar prit en particulier son frère le roi Schahzaman, et lui raconta tout ce qui lui était arrivé durant ces trois années avec Schahrazade, la fille du vizir. Et il lui dit, en résumé, tout ce qu’il avait appris d’elle et entendu de maximes, de belles paroles, d’histoires, de proverbes, de chroniques, de plaisanteries, d’anecdotes, de traits charmants, de merveilles, de poè-