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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 2, trad Mardrus, 1916.djvu/167

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histoire du bossu… (el-aschar)
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Et voici que soudain, horrible et l’œil en feu, à la porte brusquement ouverte, un nègre apparut, grand et tenant un glaive nu à la main, un glaive aux éclairs aveuglants. Et il cria au terrifié El-Aschar : « Malheur à toi, misérable ! Comment as-tu osé pénétrer dans ce lieu, ô fils de putain, fils adultérin, produit mêlé de tous les œufs pourris des scélérats ! » À ce langage assez violent mon frère ne sut quelle, réponse apporter, et sa langue se paralysa et tous ses muscles s’annihilèrent et il devint jaune de teint et affaissé de corps. Alors le nègre le prit, le mit complètement nu, et, pour allonger son supplice, se mit à lui donner de grands coups du plat de son sabre, et de la sorte plus de quatre-vingts coups ; puis il lui enfonça son sabre dans les chairs en plusieurs endroits, jusqu’à ce que mon frère tombât à terre et que le nègre le crût mort. Alors il appela d’une voix terrible, et aussitôt arriva une négresse avec un plateau rempli de sel. Elle posa le plateau à terre et se mit à remplir de ce sel les blessures de mon frère qui, malgré ses souffrances horribles, n’osait donner de la voix de peur qu’on l’achevât. Puis elle le couvrit entièrement de ce sel et s’en alla. Alors le nègre poussa un second cri aussi épouvantable que le premier, et la vieille femme se présenta et, aidée du nègre, fouilla les habits et la ceinture de mon frère, et en enleva tout l’or ; puis elle prit mon frère par les pieds et le traîna à travers les chambres jusqu’à un endroit de la cour où, par une ouverture, elle le lança au fond d’un trou noir où elle avait l’habitude de précipiter les cadavres de tous ceux que ses artifices attiraient dans cette maison pour servir