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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 2, trad Mardrus, 1916.djvu/219

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histoire de douce-amie et d’ali-nour
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continua à vivre ainsi avec elle, dans l’épanouissement, pendant encore l’espace d’une année. Quant au roi, Allah lui fit complètement oublier les dix mille dinars donnés au vizir Fadleddine pour l’achat d’une belle esclave. Mais, pour ce qui est du méchant vizir Ben-Sâoui, il ne tarda pas à connaître toute la vérité de l’histoire ; mais il n’osa encore rien dire au roi, sachant combien le vizir, père d’Ali-Nour, était bien agréé et aimé aussi bien par le roi que par tout le peuple de Bassra.

Mais, sur ces entrefaites, un jour, le vizir Fadleddine entra au hammam, et, se hâtant trop, il en sortit avant que sa sueur n’eût séché ; et, comme, au dehors, il y avait eu un grand changement de température, il attrapa un fort coup d’air qui aussitôt le jeta à bas et l’obligea à garder le lit. Puis son état s’aggrava, il ne ferma plus l’œil ni le jour ni la nuit, et arriva à une consomption qui fit de lui l’ombre de ce qu’il avait été. Alors il ne voulut pas différer davantage de remplir ses derniers devoirs, et fit appeler auprès de lui son fils Ali-Nour, qui se présenta aussitôt entre ses mains, les yeux remplis de larmes. Et le vizir lui dit : « Ô mon enfant, tout bonheur a une limite, tout bien une borne, toute échéance un terme, et toute coupe un breuvage amer. Aujourd’hui, c’est mon tour de goûter à la coupe de la mort. » Puis le vizir récita ces strophes :

« La mort peut bien t’oublier un jour, mais elle ne t’oubliera pas le lendemain. Et chacun de nous s’achemine à pas pressés vers le gouffre de la perdition.

Aux yeux du Très-Haut il n’existe ni plaine ni