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les mille nuits et une nuit

navire, pour visiter cette ville et essayer de faire quelque affaire. Le marchand, qui était devenu mon ami, me donna un sac en coton et me dit : « Prends ce sac, remplis-le de cailloux, et joins-toi aux habitants de la ville qui sortent des murs. Tu feras exactement comme tu les verras faire. Et de la sorte tu gagneras largement ta vie. »

Alors moi, je fis ce qu’il me conseillait, je remplis mon sac de cailloux et, comme je finissais ce travail, je vis sortir de la ville une troupe de gens également chargés chacun d’un sac semblable au mien. Mon ami le marchand me recommanda chaleureusement à eux, en leur disant : « C’est un homme pauvre et étranger. Emmenez-le pour lui apprendre à gagner ici sa vie ! En lui rendant ce service, vous serez largement récompensés par le Rétributeur ! » Ils répondirent par l’ouïe et l’obéissance et m’emmenèrent avec eux.

Après avoir marché quelque temps, nous arrivâmes dans une large vallée couverte d’arbres si hauts que nul ne pouvait y grimper ; et ces arbres étaient peuplés des singes en question et leurs branches étaient lourdes de gros fruits à l’écorce dure, nommés cocos d’Inde.

Nous nous arrêtâmes au pied de ces arbres, et mes compagnons déposèrent leurs sacs à terre et se mirent à lapider les singes en leur lançant les cailloux. Et moi, je fis comme eux. Alors les singes, furieux, ripostèrent en nous lançant du haut des arbres une quantité énorme de cocos. Et nous, en nous garant de temps à autre, nous ramassions ces fruits et en remplissions nos sacs.