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les mille nuits et une nuit

souffre de l’insomnie. Je désire de toi une de ces histoires-là ! » Ali le Persan répondit : « J’écoute et j’obéis, ô émir des Croyants ! Mais je ne sais s’il faut t’en raconter une que j’aie entendue avec mon oreille ou bien une que j’aie vue avec mon œil ! » Al-Rachid dit : « Je préfère une de celles où tu as toi-même figuré ! » Alors Ali le Persan dit :

« J’étais un jour assis dans ma boutique à vendre et à acheter, quand un Kourde vint me marchander quelques objets ; mais soudain il s’empara d’un petit sac qui était à ma devanture et, sans même prendre la peine de le cacher, voulut s’en aller avec, absolument comme s’il lui appartenait depuis la naissance. Alors moi je bondis de ma boutique dans la rue, je l’arrêtai par le pan de sa robe, et lui enjoignis de me rendre mon sac ; mais il haussa les épaules et me dit : « Ce sac ! mais il m’appartient avec tout ce qu’il contient ! » Alors moi, à la limite de la suffocation, je m’écriai : « Ô musulmans ! sauvez mon bien des mains de ce mécréant ! » À mes cris, tout le souk s’attroupa autour de nous, et les marchands me conseillèrent d’aller me plaindre au kâdi à l’instant. Moi, j’acceptai, et ils m’aidèrent à entraîner le Kourde, ravisseur de mon sac, chez le kâdi.

Lorsque nous fûmes arrivés devant le kâdi, nous restâmes debout respectueusement entre ses mains et il commença par nous demander : « Qui de vous est le plaignant, et de qui se plaint-il ? » Alors le Kourde, sans me laisser le temps d’ouvrir la bouche, fit quelques pas en avant et répondit : « Qu’Allah donne l’appui à notre maître le kâdi ! Ce sac que