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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 7, trad Mardrus, 1901.djvu/202

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les mille nuits et une nuit

Le khalifat lui remit une lance, et Abi-Youssouf en perça la chauve-souris qui tomba lourdement. Alors il dit : « Ô émir des Croyants, les livres de médecine nous enseignent que la chauve-souris a une semence qui ressemble étrangement à celle de l’homme. Le délit a donc certainement été commis par elle, à l’aspect de Sett Zobéida endormie ! Tu vois que je viens de l’en châtier par la mort ! »

Cette explication satisfit pleinement le khalifat qui, ne doutant plus de l’innocence de son épouse, combla le kâdi de présents, en signe de gratitude. Et Sett Zobéida, de son côté, à la limite de la jubilation, lui fit de somptueux cadeaux et l’invita à rester avec elle et le khalifat manger quelques fruits et des primeurs, qu’on lui avait apportés. Le kâdi s’assit entre le khalifat et Sett Zobéida, sur les tapis, et Sett Zobéida éplucha une banane et, la lui offrant, lui dit : « J’ai dans mon jardin d’autres fruits, rares en cette époque-ci de l’année ; les préfères-tu aux bananes ? » Il répondit : « J’ai pour principe, ô ma maîtresse, de ne jamais prononcer de jugement par défaut. Il faut donc que je voie d’abord ces primeurs-là pour les comparer à ces primeurs-ci, et donner ensuite mon avis sur leur excellence respective ! » Sett Zobéida fit aussitôt cueillir et apporter les primeurs de son jardin et, les ayant fait goûter au kâdi, lui demanda : « Lesquels de ces fruits préfères-tu maintenant ? » Le kâdi sourit d’un air entendu, regarda le khalifat, puis Sett Zobéida et leur dit : « Par Allah ! la réponse est bien difficile ! si je préférais l’un de ces fruits, je condamnerais l’autre par le fait même, et je risquerais ainsi une