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les mille nuits et une nuit

et tous étaient heureux de pouvoir entendre et interroger cette femme merveilleuse entre toutes les femmes, qui voyageait ainsi de pays en pays, en compagnie de son jeune frère, pour soutenir des thèses publiques sur les questions les plus difficiles, et interroger et être interrogée sur toutes les sciences, la jurisprudence, la théologie et les belles-lettres.

Moi, désireux de l’entendre, je priai mon ami le savant cheikh El-Salhani de m’accompagner au lieu où elle argumentait ce jour-là. Le cheikh El-Salhani accepta, et nous nous rendîmes tous deux dans la salle où Sett Zahia se tenait derrière un rideau de soie, pour ne pas contrevenir à la coutume de notre religion. Nous nous assîmes sur un des bancs de la salle, et son frère eut soin de nous en nous servant des fruits et des rafraîchissements.

Moi, après m’être fait annoncer à Sett Zahia et avoir décliné mon nom et mes titres, j’entamai avec elle une discussion sur la jurisprudence divine et sur les différentes interprétations de la loi faites par les plus savants théologiens des anciens temps. Quant à mon ami, le cheikh El-Salhani, dès l’instant qu’il eut aperçu le jeune frère de Sett Zahia, jouvenceau d’une beauté extraordinaire de visage et de formes, il fut ravi d’admiration à la limite du ravissement, et ne parvint plus à détacher de lui ses regards. Aussi Sett Zahia ne tarda pas à s’apercevoir de la distraction de mon compagnon et, l’ayant observé, finit par comprendre les sentiments qui l’agitaient. Elle l’appela soudain par son nom, et lui dit : « Il me semble, ô cheikh, que tu dois être de ceux qui préfèrent les jouvenceaux aux adolescentes…