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l’étrange khalifat
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journée son diwân et reçu ses vizirs, ses chambellans, ses émirs et ses lieutenants, et expédié les affaires en cours et jugé et condamné et absous, se retira dans ses appartements où il enleva ses habits royaux pour se déguiser en marchand, et prit, avec Giafar et Massrour, le même chemin que la veille pour arriver bientôt au fleuve, où les attendait le vieux batelier. Ils descendirent dans la barque et allèrent se cacher sous la voûte, où ils attendirent l’arrivée du bateau illuminé.

Ils n’eurent pas le temps de s’impatienter, car, quelques instants après, le bateau, au son des instruments, apparut sur l’eau embrasée par les flambeaux. Ils aperçurent les mêmes personnes que la veille, le même nombre de mamalik et les mêmes convives avec, au milieu d’eux, assis sur l’estrade entre l’étrange Giafar et l’étrange Massrour, l’étrange khalifat.

À cette vue, Al-Rachid dit à Giafar : « Ô vizir, je vois là une chose que je n’aurais jamais crue si l’on était venu me la raconter ! » Puis il dit au batelier : « Ô cheikh, prends encore ces dix dinars, et conduis-nous sur la trace de leur bateau ; et ne sois point effrayé, car ils ne nous verront pas, puisqu’ils sont dans la lumière et que nous serons dans les ténèbres. Notre but est de jouir du beau spectacle de cette illumination sur l’eau ! » Le batelier accepta les dix dinars et, bien qu’ému de crainte, se mit à ramer sans bruit dans le sillage du bateau, en se gardant d’entrer dans le cercle lumineux…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement.