Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 7, trad Mardrus, 1901.djvu/70

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
les mille nuits et une nuit

mes, je vis un tombeau de marbre encore tout neuf dont je ne réussis guère, à cause de l’éloignement, à lire l’inscription funéraire. Et je me dis : « Elle n’est donc plus ! Sa jeunesse a été fauchée ! Quel dommage qu’une pareille beauté soit à jamais perdue ! Le chagrin a dû la déborder et lui noyer le cœur…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement.

MAIS LORSQUE FUT
LA TROIS CENT CINQUANTE-UNIÈME NUIT

Elle dit :

« … Quel dommage qu’une pareille beauté soit à jamais perdue ! Le chagrin a dû la déborder et lui noyer le cœur ! »

Je me décidai alors, la poitrine rétrécie d’angoisse, à me rendre au palais de l’émir Jobaïr. Là un spectacle bien plus attristant m’attendait. Tout était désert ; les murs tombaient en ruines ; le jardin était desséché et l’on n’y voyait pas trace d’un soin quelconque. La porte du palais n’était gardée par aucun esclave, et il n’y avait là pas un être vivant qui pût me renseigner sur ceux qui habitaient à l’intérieur. À ce spectacle, moi je dis en mon âme : « Lui aussi a dû mourir ! » Puis, bien triste, bien en peine, je m’assis à la porte et improvisai cette élégie :