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histoire de dalila-la-rouée…
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les gens viennent me charger des offres pieuses qu’ils ont consacrées à mon seigneur le cheikh, et me prient de les lui porter. Il vaut donc mieux que je marche seule pour le moment ! » Et l’adolescente marcha loin derrière la vieille rouée, jusqu’à ce qu’elles fussent toutes deux arrivées au souk principal des marchands. Et de loin on entendait dans le souk voûté résonner, aux pas de la jouvencelle, le bruit des grelots d’or de ses pieds délicats et le cliquetis des sequins de sa chevelure si mélodieux et cadencé que l’on eût dit une musique de cithares et de cymbales retentissantes !

Sur ces entrefaites elles passèrent, dans le souk, devant la boutique d’un jeune marchand, nommé Sidi-Mohsen, qui était un adolescent très joli avec à peine un léger duvet naissant sur les joues. Et il remarqua la beauté de la jouvencelle et il se mit à lui lancer à la dérobée des œillades que la vieille ne fut pas longtemps à deviner. Aussi elle revint à l’adolescente et lui dit : « Viens t’asseoir un moment à l’écart, ma fille, pour te reposer, pendant que je vais ! parler d’une affaire avec ce jeune marchand qui est là ! » Et Khatoun obéit et s’assit non loin de la boutique du bel adolescent qui put ainsi la mieux regarder et, d’un seul regard qu’elle lui lança, faillit devenir fou ! Lorsqu’il fut ainsi cuit à point, la vieille entremetteuse s’approcha de lui et lui dit, après les salams : « N’es-tu point Sidi-Mohsen le marchand ! » Il répondit : « Mais oui ! Qui a pu te dire mon nom…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut.