Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
les mille nuits et une nuit

après les salams et les baise-mains, dit à la dame qui était loin de se douter de l’affaire : « Ô ma maîtresse, je désirerais bien voir notre maître le wali ! » Elle répondit : « Le wali fait la sieste ! Mais que lui veux-tu ? » Elle dit : « Mon mari, qui est marchand de meubles et d’esclaves, m’a remis, avant de partir en voyage, cinq mamelouks, avec charge de les vendre au plus offrant. Et justement notre maître le wali les a vus avec moi et, m’en ayant offert mille deux cents dinars, j’ai consenti à les lui laisser à ce prix ! Et je viens maintenant les lui livrer ? » Or le wali avait effectivement besoin d’esclaves et avait même remis, la veille, à son épouse mille dinars pour cet achat. Aussi elle n’hésita pas à croire aux paroles de la vieille, et lui demanda : « Où sont-ils les cinq esclaves ? » Elle répondit : « Là, sous tes fenêtres, dans la cour du palais ! » Et la dame regarda dans la cour et aperçut les cinq dupes qui attendaient le réveil du wali. Alors elle dit : « Par Allah ! ils sont fort beaux, et l’un d’eux vaut à lui seul les mille dinars ! » Puis elle alla ouvrir son coffre, et remit à la vieille mille dinars en lui disant : « Ma bonne mère, je te dois encore deux cents autres dinars, pour faire le prix. Mais comme je ne les ai pas, je te prie d’attendre le réveil du wali. » La vieille répondit : « Ô ma maîtresse, sur ces deux cents dinars il y en a cent que je te laisse pour la gargoulette de sirop que tu m’as fait boire, et cent que tu me devras à ma prochaine visite ! Maintenant je te prie de me faire sortir du palais par la porte réservée du harem, afin que mes anciens esclaves ne me voient pas ! » Et l’épouse du wali la fit sortir par la