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les mille nuits et une nuit

res noires en poils de chameau, sautait sur le cheval et disparaissait dans le loin, vers Baghdad.

Le lendemain, en ouvrant les yeux, les cinq, pour souhaiter le bonjour à la vieille, recommencèrent leurs invectives de la nuit. Mais le Bédouin leur dit : « Où sont les beignets ? Mon estomac les souhaite ardemment ! » En entendant cette voix, les cinq S’écrièrent : « Par Allah ! c’est un homme ! Et son parler est celui des Bédouins ! » Et l’ânier sauta sur ses pieds et s’approcha de lui, et lui demanda : « Ya Badawi, que fais-tu là ? Et comment as-tu osé détacher la vieille ? » Il répondit : « Où sont les beignets ? Je n’ai pas mangé de toute la nuit ! Surtout n’économisez pas le miel ! Elle, la pauvre vieille, avait une âme qui abhorrait les pâtisseries ; mais la mienne les aime bien ! »

À ces paroles, les cinq comprirent que le Bédouin avait été dupé comme eux par la vieille et, après s’être donné à eux-mêmes, dans leur désespoir, de grands coups sur le visage, s’écrièrent : « On ne peut fuir sa destinée ni éviter l’accomplissement de ce qui est écrit par Allah ! » Et pendant qu’ils étaient dans l’incertitude sur ce qui leur restait à faire, le wali, accompagné de ses gardes, arriva à l’endroit où ils se trouvaient, et s’approcha du poteau. Alors le Bédouin lui demanda : « Où sont les plateaux de beignets au miel ? » À ces paroles le wali leva les yeux vers le poteau et aperçut là le Bédouin à la place de la vieille ; et il demanda aux cinq : « Qu’est-ce que cela ? » Ils répondirent : « C’est la destinée ! » et ajoutèrent : « La vieille s’est échappée en dupant ce Bédouin. Et c’est toi, ô wali, que nous rendons res-