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rose-dans-le-calice et délice-du-monde
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« Ah ! je n’en puis plus ! J’ai perdu mon cœur ! Ah ! les chagrins en moi s’accumulent sur les chagrins !

« Mon cœur et ma tête se ressemblent, maintenant qu’ils ont vieilli ensemble et blanchi, par suite de l’absence de la bien-aimée, la plus belle des bien-aimées.

« C’est contre son gré que s’est faite notre séparation ; et son seul souci maintenant est de me revoir et de me posséder.

« Mais qui sait maintenant si, après cette longue absence, la destinée me réunira encore avec mon amie, si le sort fermera le livre de l’éloignement resté tout ce temps ouvert et s’il permettra qu’aux angoisses de l’absence succèdent les délices de la réunion !

« Et qui sait s’il me sera donné de revoir encore, dans les demeures, mon amie partager mes plaisirs ; et si mes deuils se changeront enfin en pures délices ! »

Lorsque Délice-du-Monde eut fini de réciter ces vers, le roi Derbas lui dit : « Par Allah ! je vois bien maintenant que vous vous aimez tous deux avec la même sincérité et la même intensité. En vérité vous êtes dans le ciel de la beauté deux astres lumineux ! Votre histoire est prodigieuse et vos aventures surprenantes ! » Puis le roi lui raconta dans tous ses détails l’histoire de Rose-dans-le-Calice. Et Délice-du-Monde lui demanda : « Peux-tu maintenant me dire, ô roi du temps, où elle se trouve ? » Il répondit : « Elle se trouve dans mon palais ! » Et aussitôt il fit venir le kâdi et les témoins et leur fit dresser le contrat de mariage de Rose-dans-le-Calice avec Délice-du-Monde. Après quoi il le combla d’honneurs et de