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grêle de coup, et qui plus est, lui déchirait les épaules à belles dents. Le combat était le plus échauffé lorsque je les atteignis : je ne pouvais emprunter d’autres secours que celui de mes mains pour séparer les combattans, les sauvages se redoutant trop mutuellement pour s’ingérer jamais, à quelque prix que ce soit, dans les disputes des uns et des autres. Mais mes forces ne répondaient point à la grandeur de l’entreprise, et le victorieux était trop animé pour relâcher sitôt sa proie. Je fus tenté de laisser ces furieux se punir par leurs mains de leurs excès ; mais je craignais que la scène ne fût ensanglantée par la mort d’un des champions : je redoublai mes efforts ; à force de secouer l’Abnakis, il sentit enfin qu’on secouait ; il tourne alors la tête : ce ne fut qu’avec bien de la peine qu’il me reconnut ; il ne se mit pas néanmoins à la raison ; il lui fallut quelques momens pour se remettre ; après quoi il donna à l’Iroquois le champ libre pour s’évader, dont celui-ci profita de bonne grâce.

Après avoir pris des mesures pour obvier au renouement de la partie, je me retirai plus fatigué qu’on ne saurait croire, de la course que je venais de faire ; mais il me fallut bientôt recommencer ; je fus averti qu’une troupe de mes guerriers assemblés sur le rivage, autour des bateaux où était le dépôt des poudres, s’y amusait à faire le coup du fusil, en dépit de la garde, et au mépris même des ordres, ou plutôt des prières des officiers ; car