Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/57

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terminés avec une promptitude et un silence admirables. Je fus sommé dans l’instant de pourvoir à ma sûreté, en gagnant la terre, et de là l’intérieur des bois. Ce ne fut point par une bravoure déplacée dans un homme de mon état que je fis la sourde oreille à l’avis qu’on avait la bonté de me donner ; mais je ne le croyais pas sérieux, parce que je croyais avoir des titres pour suspecter la vérité de la nouvelle. Quatre cens bateaux ou canots, qui couvraient depuis deux jours la surface des eaux du lac Saint-Sacrement, formaient un attirail trop considérable pour avoir pu échapper aux yeux attentifs et éclairés d’un ennemi. Sur ce principe, j’avais peine à me persuader que deux berges eussent la témérité, je ne dis pas de se mesurer, mais de se présenter devant des forces si supérieures ; je raisonnais, et il me fallait qu’ouvrir les yeux. Un de mes amis, spectateur de tout, m’avertit encore, d’un ton trop sérieux pour ne pas me rendre, que j’étais déplacé. Il avait raison. Un bateau assez vaste réunissait tous les missionnaires. On y avait mis une tente pour nous mettre à l’abri des injures de l’air, pendant les nuits assez froides dès lors sous ce climat ; ce pavillon ; ainsi dressé, formait en l’air une espéce d’ombrage qu’on découvrait aisément à la lueur des étoiles. Curieux de s’éclaircir, c’était à-peu-près la même chose. Peu, en effet, l’auraient échappée, si, par bonheur pour eux, une petite aventure ne nous eût trahis quelques momens trop tôt. Un des