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2.Alors on investira de sa charge l’ange[1]
qui est établi au sommet,
qui aussitôt les vengera de leurs ennemis.
3.Car le Céleste se lèvera du trône de son règne,
et sortira de sa demeure sainte,
avec indignation et colère en faveur de ses fils.
4.Et la terre tremblera et sera ébranlée jusqu’à ses extrémités,
et les hautes montagnes seront abaissées et secouées,
et tomberont [dans] les vallées.

5.
Le soleil ne donnera pas de lumière et se changera en ténèbres,

les cornes de la lune seront brisées et elle se changera toute en sang,

et le concert des étoiles sera troublé.
6.Et la mer descendra jusqu’à l’abîme,
et les sources d’eau manqueront,
et les fleuves seront dans l’effroi.
7.Car il se lève le Dieu suprême, seul éternel,
et il se manifestera pour punir les nations,
et il détruira toutes leurs idoles.
8.Alors tu seras heureux, Israël,
et tu monteras sur la nuque et sur les ailes de l’aigle,
et elles seront enflées [pour voler].
9.Et Dieu te haussera
et te fixera au ciel des étoiles,
au lieu où elles résident, et tu regarderas d’en haut,
10.Et tu verras tes ennemis sur la terre,
et tu les reconnaîtras et tu te réjouiras,
et tu rendras grâces et hommage à ton Créateur.


Les circonstances nous expliquent le nationalisme aigu de cette apocalypse. Il n’y est pas question de la résurrection individuelle, et l’opposition n’y est pas marquée entre les justes et les pécheurs. C’est d’Israël qu’il s’agit, ce sont les destinées religieuses de la nation qui sont en jeu, c’est Israël qui sera sauvé par un coup de théâtre. Il est vrai qu’il sera transféré au ciel des étoiles, et la révolution qui le sauve a tous les caractères d’une révolution cosmique. Ce qu’il y a ici d’extraordinaire, c’est que l’avenir existe déjà avant de succéder au passé, et qu’il lui sera substitué d’un seul coup, comme un décor en remplace un autre ; ce sera la manifestation du règne de Dieu.

  1. Tunc implebuntur manus nuntii qui est in summo constitutus. D’après Clemen, Luecken, Volz, il s’agit d’un ange, par exemple Michel. Mais Moïse lui-même, qui est un homme, est magnus nuntius, xi, 17, et il faut se souvenir du magni consilii angelus des LXX, Is. ix, 6. L’image de « remplir la main » (cf. Ex. xxviii, 41) conduit à l’idée d’onction. Il s’agit donc ici d’un Messie existant auprès de Dieu, à la façon du Livre des Paraboles, qu’on identifiait peut-être avec le Male’ak de Iahvé. Son rôle consiste uniquement à vaincre les ennemis.