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AVANT-PROPOS

tout dans l’âme, puisque M. Loisy à soin d’exclure cette hypothèse, en précisant : « La prédication de Jésus se rattache historiquement à la tradition prophétique et apocalyptique, non aux doctrines de la Sagesse[1] ». Si « les doctrines de la Sagesse » signifient quelque chose, elles sont tout entières dans la récompense que Dieu donne aux justes après leur mort. Jésus n’en aurait rien dit, se rattachant à la tradition prophétique, par où on entend la félicité terrestre, et à l’apocalyptique qui en est le merveilleux embellissement.

Ce qui ne laisse aucun doute sur la pensée intime de Jésus, d’après le même exégète, c’est que tout en « épurant la croyance commune des Juifs », il en a retenu « l’idée générale » ; « sans quoi l’on devrait dire que son enseignement a porté sur une équivoque, et la loi de ses premiers adhérents sur une méprise[2] ».

Ainsi dans cette perspective tout est clair. Jésus, tont en s’élevant beaucoup au-dessus de son temps, par la valeur morale et religieuse de son âme, ne prétendait prêcher qu’une morale provisoire, en attendant la fin prochaine. Il partageait la croyance commune des Juifs. Il en retenait l’idée générale, sinon il les aurait trompés.

Si nous avons insisté sur cette manière de voir, c’est à cause de sa vogue croissante. Il est inutile, pensons-nous, de s’arrêter à prouver que Jésus n’a pas été pharisien… à moins qu’on ne le présente conne un pharisien apocalyptique……

On peut dire sans exgération que l’avènement de l’eschatologie est le grand événement de l’exégèse du N. T. et même de toute l’histoire des origines chrétiennes. Ce qui fait la force de ce système, c’est que très réellement Jésus à rempli une mission qu’on peut dire eschatologique —— dans l’ordre de l’histoire, — et que toute sa prédication visait à l’eschatologie — c’est-à dire au salut des âmes auprès de Dieu.

Mais cette mission et cet enseignement ne sont nullement identiques à l’illusion qu’un lui prête, empruntée à une erreur qu’on dit courante. C’est évidemment ce qu’il faut démontrer contre les critiques que l’on nommera si l’on veut eschatologistes, et cette démonstration ne peut se faire que les Évangiles en main.

Toutefois il est une question préalable qui s’impose absolument.

  1. Eod. loc., p. 77.
  2. Eod. loc., p. 82