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AVANT-PROPOS.

Est-il donc vrai qu’il régnait en Palestine au temps de Jésus « une croyance commune » de l’ordre eschatologique ?

Est-il vrai que cette croyance n’avait rien de commun avec les doctrines de la Sagesse ?

En d’autres termes, les Juifs étaient-ils d’accord pour ne rêver que d’une « ère de pur bonheur dans la justice parfaite », sans distinguer entre la rétribution des justes et des pécheurs après leur mort, et la félicité messianique temporelle ? Sont-ce là des distinctions qu’on n’avait pas encore faites ? ou bien s’était-on arrêté à la même solution ?

Doit-on admettre si facilement que certaines chimères apocalyptiques avaient pénétré dans les écoles des scribes ? et peut-on nommer commune une erreur qu’ils n’auraient pas partagée ? Toutes ces questions touchent plus ou moins au thème assez vague du messianisme, en y comprenant les fins dernières qu’on ne peut en séparer.

Autant de problèmes qui ne sont pas abordés dans l’opinion très simpliste qui à séduit tant de personnes, apparemment par sa simplicité même.

Il est cependant nécessaire du moins de les entrevoir, avant de trancher si témérairement les questions évangéliques, et cette préoccupation explique, et justifie peut-être le but poursuivi dans les pages qui suivent. On serait tenté d’abord de les qualifier : recueil de solutions fausses sur les grands problèmes de l’avenir. Quand elles ne seraient que cela, elles auraient encore une utilité considérable en permettant d’opposer à ces tâtonnements le coup vainqueur du christianisme.

Elles sont cependant quelque chose de plus. Tablant sur la religion révélée, ni l’apocalyptique, ni le rabbinisme ne pouvaient en abandonner les principes fondamentaux. Il y avait là un élément sain que Jésus n’a pas rejeté non plus. Mais le problème n’en était pas moins assez difficile à résoudre pour que le spectacle de l’impuissance des hommes mît dans tout son jour la simplicité divine de la révélation faite par Jésus.

On obtiendrait en partie ce contraste en faisant de larges extraits de nos textes pour commenter l’Évangile. Mais on a toujours estimé à l’école de Jérusalem que la méthode comparative ne donne tous ses résultats — qu’il s’agisse d’emprunts ou de contrastes — que lorsque chaque mouvement d’idées est étudié en lui-même.

À dire vrai, il eût même fallu entreprendre une étude beaucoup