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ront le « chef de toutes choses, le véritable, le roi[1] ». Ce texte est probablement du temps de Néron.

Il est inutile d’insister sur cette conception : c’est celle des livres bibliques les plus récents : le règne du Dieu éternel se manifestera par des châtiments, et sera reconnu de tous.

On ne peut dater exactement cette première manière, qui domine depuis l’époque persane ; mais on aimerait à connaître la date précise d’autres passages, plus intéressants et moins clairs. Ils sont contenus dans cette partie du livre III, du vers 573 au vers 795, que l’on attribue en général à l’an 140 avant Jésus-Christ.

Que certains endroits datent de ce temps, par exemple les vers 608-615[2], c’est ce qui ne peut être mis en doute. Mais toute cette tirade est-elle d’un seul morceau ? Si oui, ce serait d’une grande conséquence pour dater l’union de l’empire des saints de Daniel avec un Messie personnel, et c’est précisément pour ne pas attribuer à ce concept une origine trop haute que M. Geffcken partage le tout entre deux sibylles dont l’une aurait écrit vers l’an 140, et l’autre vers l’an 80. Tel qu’il est énoncé, l’argument a bien un peu l’air d’une pétition de principe ; cependant il est difficile d’admettre que tout l’ensemble émane d’un même auteur, tant il y a peu de suite dans les idées.

Relativement au règne, la Sibylle a en même temps sous les yeux le règne éternel de Dieu, qui tantôt paraît régner seul sur les saints, constitués en un empire qui ressemble beaucoup à celui de Daniel, tantôt est secondé par un roi qui est évidemment le Messie[3].

C’est lui qui paraît tout d’abord[4] :

Alors Dieu enverra [du côté] du soleil un roi
qui fera cesser sur toute la terre la guerre funeste,
tuant les uns, faisant une solide alliance avec les autres.
Or, il ne fera pas tout cela par ses propres desseins,
mais en suivant les nobles décisions du grand Dieu.

C’est bien le Messie du psaume xvii de Salomon. Mais ce n’est qu’une courte esquisse de son règne.

Ce qu’on trouve ensuite ressemble plutôt à une théocratie sans roi terrestre :

  1. v, 499 : τὸν πρύτανιν πάντων, τὸν ἀληθέα, τὸν βασιλῆα.
    Le prologue contient l’idée du « Dieu roi, qui surveille toute chose », mais il est de trop basse époque pour qu’on ait à en tenir compte ici ; dans l’édition de Berlin, fragment iii, 24.
  2. A cause de la mention du septième roi d’Égypte, v. 608.
  3. Tous les textes dont nous aurons à parler sont de la seconde Sibylle de M. Geffcken.
  4. iii, 652-656.