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Cet auteur emploie ‘olâm dans le sens de monde[1], mais encore bien près de sa valeur primitive, mettant en parallélisme les rois anciens et les dominateurs du siècle passé[2], ou du monde ancien. Et la Sagesse emploie αἰών dans le sens de monde[3].

Le monde qui vient, par opposition à ce monde-ci[4], est donc le monde à venir. Lequel ? les temps messianiques ou le monde de l’au-delà ?

La question ne peut être résolue que par l’examen des textes.

Il est très souvent question du monde à venir dans les sentences des tannas. Ce terme s’applique à une conception suffisamment claire ; et si elle demeure dans une certaine obscurité, inhérente au sujet, du moins est-elle ordinairement distincte du concept des temps messianiques.

Il est facile de s’en convaincre en parcourant ces dires. Les oppositions sont réelles et marquées. Le monde à venir est le monde de la rétribution individuelle, tandis que les temps messianiques sont la délivrance et le triomphe d’Israël ; le monde à venir est promis aux justes après leur mort, tandis que les temps messianiques feront la félicité des générations qu’ils trouveront vivantes ; le monde à venir est tout à fait distinct de ce monde corruptible ; il n’est pas décrit, si ce n’est par des allusions très sobres, précisément parce qu’il est absolument mystérieux ; il ne peut être question de lui assigner un terme ; tous caractères opposés à ceux des temps messianiques.

Il faut revenir sur ces points. Les textes que nous aurons occasion de citer nous feront bien pénétrer dans les idées des maîtres en Israël.

Le monde à venir est le monde de la rétribution individuelle, ou, pour parler plus exactement, de la récompense individuelle, car le terme de monde à venir ne s’applique pas au châtiment des pécheurs. Il constitue une vie nouvelle, ce qu’on ne saurait dire de l’existence des réprouvés, à supposer qu’elle aussi soit éternelle.

C’est sur quoi insistent surtout les textes.

Hillel paraît être le premier auquel cette expression, le monde à venir, a été attribuée par la tradition. Il disait : « Celui qui acquiert les paroles de la Loi, acquiert la vie du monde à venir »[5].

  1. iii, 18 : מעט נפשך מכל גדולות עולם
  2. xvi, 7 : לא נשא לנסיכי קדם המורים עולם בגבורתם.
  3. Sap. Sal. xviii, 4, mais non les psaumes de Salomon ; le mot αἰών y est employé 31 fois, mais toujours dans le sens de l’avenir indéfini, sauf une fois (viii, 7) où il marque le temps passé.
  4. הָעוֹלָם הַזֶּה
  5. Aboth, ii, 7 : קנה לו דברי תורה קנה לו חיי העולם הבא.