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LE POISSON D’OR

Il était dans l’eau jusqu’aux reins, car la plate ne pouvait pas accoster. Je pris le sac ; il pesait lourd. Embarque !

— Garçon, nous aurons du bonheur, si nous pouvons doubler les Chats cette nuit !

Les Chats, c’est la pointe est de Groix ; je ne comptais pas aller si loin que cela.

— Vous donnerez un coup de main, notre maître, et nous doublerons le diable !

Il s’assit devant moi, nous commençâmes à tirer. Quelles lames ! La mer flamait : avez-vous vu ça quelquefois ? Nos avirons trempaient dans du feu : un feu blanchâtre et livide. La plate craquait. Va toujours ! c’est égal ! J’allais.

Le sac était au fond du bateau. C’est noir, le cuir, et c’est épais. Comment se fait-il que je voyais l’argent reluire au travers ?

Je le touchais avec mon pied et cela me donnait la fièvre. Je dis au Chédéglise :

— Allumons ! nous sommes encore dans les eaux de Gavre. Hardi, à moi, là ! poussons ! la lame sera longue une fois la pointe doublée et, dans une heure, nous aurons courant de jusant, Ferme !

Il tirait de son mieux, et moi, donc !

Ferme ! En poussant, mon pied avait glissé sur le sac de cuir, où les louis d’or parlèrent. Avais-je besoin de cela ? J’étais derrière le Chédéglise, je me levai sur mes deux jambes, et, reculant jusqu’à l’avant de la plate, je lui déchargeai un coup d’aviron sur le crâne… Vous vous attendiez à cela, monsieur Corbière ? Il y a des lois contre les calomniateurs. Essayez de faire croire aux conseillers de la Cour impériale que je voua ai moi-même raconté cette histoire ! Essayez !