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Page:Le poisson d'or.djvu/14

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LE POISSON D’OR

comme un merlus ». C’est le vendredi du chrétien pauvre. Entre Avranches et Saint-Nazaire, on fait une soupe de merlus pour deux sous : une cotriade, si vous voulez le vrai nom de la bouillabaisse bretonne.

Il n’est personne ici, excepté moi, qui n’ait ses raisons pour connaître quelque peu la noble science du blason. Ces dames n’ont peut-être pas toutes lu Jean d’Arras, le père Étienne, ou même Brantôme, mais ces messieurs pourront témoigner que l’histoire héraldique des maisons de Lusignan, de Sassenage, de Luxembourg et de Rohan, serait on ne peut plus pâle sans la fée Mélusine. La fée Mélusine était un poisson, au moins par sa queue. Presque tous les vieux auteurs écrivent Merlusine. De merlusine à merlus, je m’adresse à votre conscience et je vous demande s’il y a plus large que le doigt !

Or, si l’on établissait devant vous, preuves en mains, que cette merveilleuse sirène des temps chevaleresques Mélusine, fille de Pessine, tête de vierge sur un corps d’anguille, est venue, ces années dernières, en plein dix-neuvième siècle, pousser ses trois cris fatidiques pour sauver un descendant du premier baron chrétien, un fils des ducs de Bretagne ou un héritier des rois de Jérusalem, votre curiosité serait vivement excitée, n’est-ce pas ? Eh bien en Bretagne, Penilis s’allie, depuis cinq cents ans, à Rohan, à Rieux, à Chateaubriand, et son merlus vaut la mélusine.

J’ajoute, pour clore ma préface, que Penilis est aussi noblement apparenté à Paris qu’à Quimper. Mme la duchesse, qui a appris un peu le breton, à l’occasion du mariage de sa sœur, sait que Chédéglise (chef ou tête d’église) est la traduction exacte du nom celtique Pen-Ilis.