Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sûr, derrière le secret professionnel, puisqu’il s’agit d’une question de droit et de moralité publique sur laquelle des hommes comme d’Aguesseau se sont prononcés avant lui — qu’est-ce que M. Casimir-Périer en penserait ?

M. le Président. — Permettez-moi de vous dire qu’il est inutile, par des questions indirectes, de vouloir arriver au même résultat. Je ne poserai pas la question. (Bruits dans l'auditoire.)

Me Clémenceau. — Monsieur le Président, je crois que vous avez peut-être mal compris la question de mon confrère Labori.

M. le Président. — Vous me demandez de poser cette question à M. Casimir-Perier : Ne sait-il pas qu’à une époque...

Me Clémenceau. — On demande à M. Casimir-Périer ceci : Si vous appreniez demain qu’une personne a été condamnée sur une pièce qui ne lui a pas été montrée, quelle serait votre opinion ?

C’est là une question de bonne foi. M. Casimir-Périer a occupé une situation assez haute pour qu’on puisse lui demander son opinion.

M. le Président. — Ce n’est pas un fait, c’est une opinion.

Me Clémenceau. — La Cour refuse de poser cette question ?

M. le Président. — Elle n’est pas à poser.

Me Labori. — Eh bien ! sur cette question comme sur les autres, nous déposerons des conclusions.

Me Clémenceau. — Un dernier mot. Quand M. Casimir-Périer est venu à la barre, il a commencé à déposer avant d’avoir prêté serment, et M. le Président l’a interrompu en lui disant...

M. le Président. — Parfaitement ; c’est un témoin...

Me Clémenceau. — Je ne veux pas contester les faits. Je vous rappelle qu’avant d’avoir prêté serment, M. Casimir-Perier a prononcé quelques paroles, et je veux savoir si, après avoir prêté serment, il est prêt à les répéter ?

M. le Président. — Mais...

Me Clémenceau. — J’en appelle au témoin : M. Casimir-Périer a dit textuellement que son devoir était de ne pas dire la vérité. (Exclamations.)

M. le Président. — Monsieur Casimir-Périer...

M. Casimir-Perier. — Voulez-vous me permettre...

Me Clémenceau. — Il y a une erreur de mots ; je vais rectifier. J’ai voulu dire — il faut laisser la salle s'amuser ! — que M. Casimir-Périer — je fais appel à ses souvenirs — a dit :

« Je crois qu’il est de mon devoir de ne pas dire toute la vérité. »

M. le Président. — Ce n’est pas là du tout ce que M. Casimir-Périer avait dit tout à l’heure. Il avait déclaré qu’il ne croyait pas devoir parler.

Me Clémenceau. — Non, monsieur le Président, j’ai copié la phrase.

M. le Président. — Mais vous savez pour quel motif.