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L’ŒUVRE IGNORÉE DE L.-P. MOUILLARD

observations de Mouillard, Marey devint un défenseur de son œuvre, et fit partager son sentiment à ses élèves.

L’un d’eux, Albert Bazin, devait être le premier à apporter au solitaire, en Égypte même, la consolation réchauffante d’une admiration passionnée.

M. Albert Bazin, né à Marseille en 1854, était un grand chasseur d’oiseaux, que ses affaires avaient amené à Port-Saïd vers 1882. Ayant travaillé quelque temps à Paris, dans le laboratoire de Marey, puis tenu, sous diverses latitudes, des oiseaux de toute espèce au bout de son fusil, il possédait la vision nette des silhouettes exactes. Ayant aperçu l’Empire de l’Air à la devanture d’un libraire de Port-Saïd, il fut vivement frappé par l’exactitude du dessin représentant l’ombre portée d’une sarcelle qui orne la couverture. Il reconnut aussitôt dans l’auteur de ce croquis un observateur de premier ordre.

L’ouvrage lu, dévoré plutôt, un désir impérieux de connaître l’homme qui avait jeté sur le papier toutes ces ingénieuses pensées s’empara du lecteur. La résolution fut vite prise, et Albert Bazin accourut au Caire pour dire à Mouillard qu’il ambitionnait d’être son disciple. Il trouva seul, avec les Borelli, dans l’humble maison du Mousky, un homme las et doux, qui, bien que non médecin, mais parce qu’il connaissait l’emploi des simples, donnait ses soins aux pauvres Arabes.

Mouillard reçut comme un fils son admirateur enthousiaste qui resta là pendant huit jours. Il le fit monter sur sa « tour d’ivoire », la terrasse de la maison.

« Le Caire était, à cette époque, la ville des grands