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SUR LES NOMBRES TRANSFINIS.

après tous ceux de , pour obtenir une suite dont la place du dernier élément ne pourrait être notée avec les symboles constituant . Ainsi est non dénombrable ; mais avant tout élément de il n’y a qu’une infinité dénombrable de nombres, au plus.

Ce fait est tout à fait analogue au suivant : la suite des nombres entiers est telle qu’avant tout élément de il n’y a qu’un nombre fini de nombres ; mais, comme l’addition d’un élément à toute suite finie donne une suite finie, la suite n’est pas finie.

Au cours de ces considérations, nous avons admis à plusieurs reprises comme évident, que le numérotage des éléments d’une suite ordonnée à l’aide des symboles successifs de , ne pouvait se faire que d’une façon. Par exemple, nous avons considéré comme clair que si l’on numérote les éléments de en tant que termes d’une suite avec les éléments de en tant que nombres, chaque élément est identique au nombre qui fixe son rang. On peut, sinon rendre ces faits plus clairs, du moins les présenter sous une forme à laquelle on est plus habitué, en disant :

Faisons correspondre les éléments de deux suites et de manière que les deux premiers éléments de et se correspondent et que, si les premiers éléments en nombre fini ou dénombrable de , soient , , …, correspondent aux premiers éléments , , … de , le premier élément de après , , … corresponde au premier élément de , après , , … ; si ces deux éléments existent.

Montrons que cette correspondance est bien déterminée. En effet, il y a des éléments de pour lesquels la correspondance est déterminée ; le premier élément de , par exemple. Considérons l’ensemble de tous les éléments de pour lesquels la correspondance est déterminée ainsi que pour tous les éléments antérieurs. Alors, s’il restait encore des éléments dans et dans , la correspondance, d’après sa définition même, serait encore déterminée pour le premier élément de après . Ceci serait en contradiction avec la définition de  ; donc la correspondance est entièrement déterminée et épuise ou , ou les deux. Dans ce dernier cas, on dit que les suites sont semblables.

Dans le cas où est la suite des nombres transfinis, il y aurait contradiction à supposer que la correspondance épuise sans épuiser  : Toute suite est semblable à ou semblable à un segment de . (Par un segment d’une suite, on entend tous les éléments qui précèdent un élément donné).

Toutes les suites non finies que nous rencontrerons, sauf , seront dénombrables ; elles seront donc semblables à un segment de . Or, un segment de est entièrement déterminé par le nombre qui le suit ; à chaque suite dénombrable nous pouvons attacher un nombre transfini qui nous fait connaître les nombres finis et transfinis nécessaires au numérotage des éléments de . Ce nombre nous donne ainsi un renseignement extrêmement important sur , mais ne nous permet naturellement pas de distinguer entre et les suites semblables puisque, par définition, est le