Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/155

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Il me sembla que j’échappais aux griffes de quelque monstre, à la méchanceté d’un rêve abominable. Je respirai longuement. Tout s’ouvrait devant moi, tout s’éclairait. J’aurais voulu crier mon allégresse, et remercier, et chanter des actions de grâces.

Et je songeais que si j’avais résisté à cette voix intérieure qui m’ordonnait de revendiquer loyalement la responsabilité de mon acte, je n’aurais jamais su la bienfaisante vérité et aurais eu le remords d’avoir tué et le remords d’avoir été lâche.

Cela réussit donc quelquefois d’accomplir son devoir ?

Je dis à l’enfant :

— Les beaux joujoux ! qui te les a apportés ?

Il répondit :

— Le Petit Noël… il est venu par le toit…

J’allai vers la cheminée, je me baissai, et sortant mon portefeuille de ma poche, je feignis de le trouver derrière les chenêts.

— Et celui-là que tu n’as pas vu ? un beau joujou ! tiens… c’est pour toi, prends…

Maurice LEBLANC.